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mardi 25 septembre 2012
Ces derniers mois, plusieurs publications américaines ont apporté de nouvelles informations sur le phénomène de montée du niveau des mers, conséquence principale du changement climatique.

Les estimations du GIEC revues à la hausse

Dans une étude publiée le 22 juin 2012, le Conseil National de la Recherche (NRC), organisme public chargé de réaliser les études commandées à l'Académie des Sciences, a revu à la hausse les précédentes estimations de la montée du niveau des mers au cours du 21ème siècle[1]. D'après ses résultats, le niveau moyen des eaux à l'échelle mondiale devrait augmenter de 8 à 23 centimètres d'ici 2030 (par rapport au niveau de 2000), de 18 à 48 cm d'ici 2050, et de 50 à 140 cm d'ici 2100.

Cette dernière estimation est sensiblement supérieure à celle proposée par le Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC), dont la dernière étude de référence sur les changements climatiques date de 2007. A l'époque, une montée des eaux comprise entre 18 et 59 cm d'ici la fin du siècle était envisagée, avec jusqu'à 17 cm d'augmentation supplémentaire en cas de changements brusques dans les cycles de formation de la glace.


Sur la Côte Ouest des Etats-Unis, la hausse du niveau de la mer est plus importante que prévu

Financée par les états de Californie, de l'Oregon et de Washington ainsi que par plusieurs agences fédérales, l'étude de la NRC se concentre particulièrement sur les côtes de ces états de l'Ouest des Etats-Unis. Il en ressort que celles-ci ne seront pas affectées par la montée des eaux dans les mêmes proportions. La Californie devrait ainsi être particulièrement touchée : sur la côte au sud du cap Mendocino, le niveau de la mer devrait augmenter de 4 à 30 cm d'ici 2030, de 12 à 61 cm d'ici 2050 et de 42 à 167 cm d'ici 2100. Les experts du NRC expliquent ces résultats élevés par la forte érosion qui affecte une grande partie de la côte californienne, la rendant plus vulnérable à la montée des eaux.

En revanche, le reste de la côte Ouest des Etats-Unis (nord de la Californie, Oregon, Washington) devrait être moins fortement affectée, puisque l'augmentation est évaluée entre 10 et 143 cm d'ici 2100. Cette région est le théâtre d'un phénomène géologique de subduction, qui se traduit par un enfoncement progressif de la plaque océanique sous la plaque continentale et par une élévation du niveau du sol, résultant ainsi en une moindre augmentation du niveau des eaux.

L'étude précise que si le niveau de confiance dans les résultats est relativement haut pour les dates les plus proches, les estimations à l'horizon 2100 sont cependant à considérer avec prudence, car elles reposent sur des extrapolations importantes comportant des incertitudes significatives. Cependant, l'occurrence de certains événements extrêmes pourrait contribuer à élever brusquement le niveau de la mer. Par exemple, un séisme de magnitude 8 ou supérieure au nord du cap Mendocino pourrait entraîner une augmentation rapide du niveau de la mer d'un mètre ou plus, et une submersion rapide d'une partie de la côte. Le dernier séisme de cette magnitude remonte à 1700, et il survient en moyenne tous les mille ans. Dans cette région, de nombreuses infrastructures ont été construites à proximité des côtes et sont particulièrement vulnérables à l'augmentation de niveau de la mer. Ainsi, l'aéroport international de San Francisco pourrait être inondé en cas d'augmentation de 40 cm, un cas de figure réaliste d'ici quelques décennies.

"Avec la montée du niveau moyen des mers, on s'attend à une forte augmentation du nombre de tempêtes extrêmes et de vagues géantes, ce qui accroît le risque d'inondation, d'érosion côtière et de perte de zones marécageuses", souligne Robert Dalrymple, président du comité d'experts, co-auteur de cette étude.



Sur la Côté Est des Etats-Unis, une augmentation du niveau de la mer bien plus rapide que la moyenne mondiale


Une autre publication, parue dans le journal Nature Climate Change le 24 juin 2012[2], vient confirmer l'hypothèse que si la montée du niveau des mers est un phénomène mondial, elle n'est pas uniforme et affecte plus fortement certaines régions que d'autres. Conduite par des chercheurs de l'U.S. Geological Survey (USGS), l'étude et ses résultats tendent à montrer que le niveau de la mer le long de la côte Atlantique des Etats-Unis augmente bien plus rapidement que la moyenne mondiale.

En effet, il apparaît que le long de la côte Nord-Est - du nord du cap Hatteras (Caroline du Nord) au nord de Boston (Massachussetts), des variations importantes en termes de courants océaniques, de températures et de salinité de l'eau amplifient localement le phénomène de montée des eaux. Au cours de la période 1980-2009, l'augmentation moyenne du niveau des eaux était comprise entre 2 et 3,7 mm/an, un rythme 3 à 4 fois supérieur à la moyenne mondiale sur cette période (0,6 à 1 mm/an). "Beaucoup de gens pensent à tort que puisque la fonte des glaciers et calottes polaires fait augmenter le volume total des océans, le rythme de l'augmentation du niveau de la mer est le même partout, mais d'autres effets sont tout aussi ou plus important [...]" déclare Marcia McNutt, directrice de l'USGS. "Comme cette étude le démontre, les facteurs océanographiques régionaux doivent être pris en compte dans les prédictions de l'impact côtier au niveau local."

Ces résultats surprenants pourraient en partie s'expliquer par le ralentissement des courants océaniques dans l'Océan Atlantique. A cause de la fonte des glaces, d'importantes quantités d'eau douce sont déversées dans les océans, qui a pour effet d'amoindrir les différences de densité entre les couches d'eau et de ralentir les courants océaniques. Or, certains de ces courants comme le Gulf Stream et la dérive Nord Atlantique ont tendance à faire circuler les masses d'eau le long des côtes et d'empêcher l'augmentation du niveau des eaux.

Ce "point chaud" de la montée des eaux pourrait avoir de graves conséquences pour les agglomérations urbaines très peuplées de la région. "Des villes comme Norfolk, New York, et Boston subissent déjà des inondations importantes lors de tempêtes de relativement faible intensité" déclare le Dr. Asbury Sallenger, auteur de l'étude et océanographe à l'USGS. "La montée rapide du niveau des eaux à l'heure actuelle va rendre les villes côtières de plus en plus vulnérables aux inondations, en amplifiant les tempêtes et les raz-de-marée".


La dilatation thermique des eaux rend la montée du niveau des mers inéluctable

Dans une autre étude parue le 1 juillet 2012 dans Nature Climate Change, une équipe de scientifiques montre que même si les plus ambitieuses mesures de réductions d'émissions de gaz à effet de serre (GES) étaient adoptées, elles pourraient ne pas suffire à arrêter totalement la montée du niveau des eaux[3].

"Même en adoptant des mesures drastiques de réduction [de GES] pour limiter l'augmentation de la température à 2°C d'ici 2100, et avec un déclin de la température au 22e et 23e siècle... le niveau de la mer continuera à monter après 2100" déclarent les auteurs de l'étude, des chercheurs du Centre National pour la Recherche Atmosphérique (NCAR, Colorado), de l'organisation Climate Central et du Center for Australian Weather and Climate Research de Melbourne.

En effet, à cause de la hausse moyenne de la température océanique, les eaux des mers ont tendance à se réchauffer et à se dilater sous l'effet de la chaleur. Ainsi, la même quantité d'eau occupe un volume plus important et fait mécaniquement monter le niveau des mers. A mesure que la température des eaux augmente, la chaleur est diffusée des couches superficielles de l'océan aux couches profondes, amplifiant le phénomène de dilatation thermique. Même si la température de surface des océans venait à diminuer et la couche d'eau superficielle à refroidir, la chaleur diffusée dans les couches profondes de l'océan prendrait du temps à se dissiper et continuerait à dilater les masses d'eau. Ce phénomène physique vient s'ajouter à l'apport d'eau résultant de la fonte des glaces et amplifie le problème de la montée du niveau des mers.

D'après les résultats de l'étude, dans l'hypothèse où les plus fortes réductions de GES sont réalisées - un scénario qui implique des émissions mondiales négatives de GES d'ici l'année 2070 - la température moyenne du globe augmenterait jusqu'à un pic de +0,83°C en 2100 avant de redescendre à +0,55°C en 2300 (par rapport à la moyenne sur la période 1986-2005). Dans ce cas de figure, l'augmentation du niveau des eaux attribuable à la dilation thermique serait de 14,2 cm en 2100 et jusqu'à 24,2 cm en 2300.

Dans l'hypothèse la plus pessimiste - faibles mesures de réduction des GES d'ici 2070 et mix énergétique mondial toujours composé de 80% d'énergie fossile à cette date - la température moyenne du globe pourrait atteindre +3,91°C en 2100 et +8,52°C en 2300. Dans ce cas de figure, la dilatation des eaux océaniques augmenterait le niveau des mers de 32,3 cm en 2100 et jusqu'à 139,4 cm en 2300. "Bien que la montée du niveau des eaux ne peut pas être stoppée avant au moins plusieurs centaines d'années, des mesures ambitieuses de réduction [des GES] peuvent permettre de ralentir cette tendance, ce qui permettrait de gagner du temps pour mettre en place des politiques d'adaptation" expliquent les auteurs de l'étude.
 

Notes

    "Sea-Level Rise for the Coasts of California, Oregon, and Washington: Past, Present, and Future" - National Research Council - Washington DC - 22/06/2012


    "Hotspot of accelerated sea-level rise on the Atlantic coast of North America" - Nature Climate Change - SALLENGER Jr., Asbury, DORAN Kara, HOWD Peter - 24/06/2012


    "Relative outcomes of climate change mitigation related to global temperature versus sea-level rise" - Nature Climate Change - MEEHL Gerald, HU Aixue, TEBALDI Claudia, ARBLASTER Julie, WASHINGTON Warren, TENG Haiyan, SANDERSON Benjamin, AULT Toby, STRAND Warren, WHITE James - 01/07/2012

Sources

    "California Sea Level Projected to Rise at Higher Rate Than Global Average; Slower Rate for Oregon, Washington, But Major Earthquake Could Cause Sudden Rise" - National Research Council News Release - Washington DC - 22/06/2012
    

"U.S. East Coast a "hot spot" for sea level rise: study" - Reuters - ZABARENKO Deborah - Washington DC - 25/06/2012
    

"East Coast faces faster sea level rise" - ScienceNews - POWELL Devin - 24/06/2012
   

 "Sea Level Rise Accelerating in U.S. Atlantic Coast" - US Geological Survey Press Release - 24/06/2012
    

"Rise in sea level can't be stopped: scientists" - NewsDaily Science News - CHESTNEY Nina - London - 01/07/2012


Source de l'article: © C. Magdelaine / notre-planete.info

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