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jeudi 8 octobre 2015
Les sanctions des rejets polluants en mer restent très rares

Seuls trois navires ont fait l'objet de poursuites judiciaires en France en 2014 suite à un rejet de pollution en mer. Le nombre d'actes délictueux semble en baisse mais des navires passent à travers les mailles du filet.

La direction des affaires maritimes du ministère de l'Ecologie a publié le 2 octobre le bilan de la surveillance des pollutions maritimes pour l'année 2014. Outre un état des lieux des pollutions constatées dans les eaux sous juridiction française, le rapport fait état des actions judiciaires engagées à l'encontre des pollueurs. Des statistiques qui ne font pas mentir ceux qui dénoncent de façon récurrente la faiblesse du droit pénal de l'environnement.

Les juridictions compétentes en matière de pollution maritime En France métropolitaine, les juridictions du littoral spécialisées (Julis), compétentes pour juger les pollutions marines volontaires, sont les tribunaux de grande instance de Brest, Marseille et Le Havre. En France d'outre-mer, il s'agit de Fort-de-France, Saint-Denis-de-La-Réunion et Saint-Pierre-et-Miquelon. Le tribunal de grande instance de Paris est compétent pour juger des infractions commises par les capitaines de navires français se trouvant hors des espaces maritimes sous juridiction française.

"L'effectivité du droit de l'environnement est faible", déplorait ainsi Dominique Guihal, conseillère à la cour d'appel de Paris lors d'un colloque organisé par le Conseil d'Etat en 2013. En septembre dernier, l'avocat Christian Huglo désignait encore le droit pénal de l'environnement comme le "parent pauvre du droit environnemental".

Trois informations judiciaires en 2014

Le nombre d'ouvertures de dossiers judiciaires pour rejets illicites est très faible pour l'année 2014. Il ne s'élève qu'à trois. Le premier concerne le chimiquier turc Deniz-S pour un rejet en Manche-Mer du Nord. Le deuxième vise le navire-citerne italien Rita en raison d'une traînée suspecte au large des côtes françaises de la Méditerranée. Le troisième concerne également un navire-citerne, mais battant pavillon du Royaume-Uni cette fois, pris en flagrant délit de rejet polluant en Méditerranée. "Deux flagrants délits, constatés par des agents français, n'ont pas fait l'objet de poursuites judiciaires par le juge français", relève toutefois le rapport. Ils concernaient le navire à passagers La Foyalaise en Martinique et le cargo russe Yashma au large de Dieppe.

La faiblesse de ces statistiques s'explique-t-elle par une baisse des comportements délictueux et/ou par la faiblesse de la réponse pénale ? Une baisse des pollutions constatées ressort effectivement des chiffres présentés. Sur l'année 2014, 255 signalements de pollutions en métropole ont été rapportés aux centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross) qui ont pour mission de centraliser les informations et de coordonner les interventions visant à faciliter la constatation des infractions. Soit une baisse de 76 signalements par rapport à l'année précédente. Le nombre de signalements outre-mer est très faible (44 en 2014), mais ce résultat est en partie dû à l'absence d'outils de détection pour assurer une surveillance de la zone, reconnaît la direction des affaires maritimes. Une faiblesse qui devrait commencer à être comblée cette année avec le déploiement de nouveaux outils de surveillance.

Parmi les 299 alertes de pollution reçues, seules 46% sont confirmées. Si les signalements de pollution suivent une tendance à la baisse depuis 2008, la proportion de pollutions confirmées est toutefois à la hausse. Les auteurs du rapport l'expliquent notamment par l'envoi plus rapide de moyens sur zone avec du personnel de mieux en mieux formé à l'analyse des pollutions.

Cas de pollution réelle relevés en 2014

Dépaysement des affaires

"Le nombre de navires pris en flagrant délit a connu une forte chute depuis 2009 et se maintient depuis à un chiffre relativement faible", confirment les auteurs du rapport qui donnent pour explication le montant dissuasif des peines. Celles-ci peuvent atteindre 10 ans d'emprisonnement et 15 millions d'euros d'amendes pour les capitaines coupables d'un rejet d'hydrocarbures ou de substances liquides nocives transportées en vrac. Ces peines sont de 7 ans d'emprisonnement et de 1 million d'euros d'amendes maximum pour les rejets de substances nuisibles transportées en colis. L'examen des peines prononcées montre toutefois que ces quantums ne sont jamais atteints. Ainsi, l'armateur du Deniz-S s'est-il vu infliger une peine de 100.000 euros d'amende et son capitaine 50.000 euros. Soit 300 fois moins que la peine maximale encourue.

Le rapport avance aussi "les modifications des comportements délictuels, en particulier les rejets nocturnes" pour expliquer cette baisse des pollutions constatées. Le nombre de pollutions serait donc objectivement en baisse, mais une tendance à relativiser compte tenu de la dissimulation de certains faits délictueux.

Le faible nombre de condamnations d'auteurs de pollution par les juridictions françaises peut également s'expliquer par le recours à l'article 228 de la Convention de Montego Bay qui permet le dépaysement de l'affaire. Celui-ci est "de plus en plus systématique", révèlent les auteurs du rapport, "le risque étant que les prévenus soient peu sanctionnés, voire lavés de tout soupçon". L'affaire du Kaltene, un chimiquier battant pavillon des Iles Marshall, a toutefois montré que des limites pouvaient être posées au dépaysement. L'Etat français a en effet décidé de rejuger l'affaire dans l'hexagone après que la justice de l'archipel ait conclu au caractère involontaire de la pollution.

Quoi qu'il en soit, l'internationalisation de la justice pénale apparaît comme une nécessité pour assurer l'effectivité de la sanction. Ainsi, le rapport du professeur Laurent Neyret, remis à la Garde des Sceaux en février 2015, souligne-t-il l'impérieuse nécessité d'harmoniser les sanctions pénales entre les Etats, afin d'éviter tout dumping environnemental, et d'adapter ces sanctions à la gravité des actes délictueux. Une question qui sera à l'ordre du jour de la conférence internationale sur la criminalité environnementale qui doit se tenir à Nîmes début novembre.

Source © Laurent Radisson / Actu-Environnement  







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