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vendredi 25 avril 2014
19:35
Si le plan PCB 2008-2013 a permis des avancées pour maîtriser les émissions des polychlorobiphényles, il n'est pas parvenu à éliminer les PCB des rivières où ces polluants "demeureront dans les décennies à venir", selon le rapport du CGAAER.
Le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a publié le 17 avril un rapport évaluant le plan quinquennal de lutte contre les polychlorobiphényles (PCB), lancé en 2008, suite aux taux de contamination relevés dans les poissons du Rhône.
Pour rappel : cette contamination avait été révélée dans le cadre du plan de surveillance de la qualité des aliments, au cours du premier semestre 2005. Des teneurs élevées en PCB avaient été retrouvées dans des brèmes prélevées dans une dérivation du Rhône : le canal de Jonage. Depuis, plusieurs campagnes successives de prélèvements et d'analyses ont été menées sur plusieurs espèces de poissons et sur les sédiments. Utilisés pour leurs propriétés isolantes et diélectriques, notamment dans des appareils électriques (transformateurs, condensateurs…), les PCB sont des composés aromatiques "très stables, réputés cancérigènes et classés comme perturbateurs endocriniens", souligne le CGAAER dans son rapport. Si leur fabrication et leur utilisation sont interdites en France depuis 1987, ils sont encore une source de pollution "qui est sous surveillance".
Le plan PCB 2008-2013 comprenait un programme d'analyse des sédiments et des poissons du fleuve, ainsi qu'un programme de mesure de l'imprégnation en PCB de consommateurs de poissons d'eau douce. Il prévoyait aussi un plan d'élimination des transformateurs électriques pollués. Depuis le 31 décembre 2010, il est interdit de détenir des appareils dont le fluide contient plus de 500 ppm (parties par million) de PCB, selon le décret du 18 janvier 2001.
L'évaluation du plan a été menée conjointement avec le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Ses actions ont mobilisé "des fonds importants" sur le budget de l'État, soit 13 millions d'euros permettant de "mieux cerner l'étendue de la contamination", auxquels s'ajoutent 500 millions € dédiés à l'élimination des transformateurs.
Rémanence des PCB dans les sédiments
Le plan est aujourd'hui "quasiment terminé", concluent les rapporteurs. S'il a permis "de bien améliorer la connaissance des contaminations par les PCB et la manière de les gérer", ce plan n'est toutefois pas parvenu "à éliminer les contaminations constatées dans les sédiments des cours d'eau". "Malheureusement, les PCB resteront présents dans les sédiments de nombreuses années", alertent les auteurs.
Les sites industriels ayant utilisé des PCB dans le passé pour des fabrications diverses (linoleum, peinture, ..) demeurent des sources "potentielles" de contamination, de même que ceux qui abritent d'anciens transformateurs. "L'attention des repreneurs, voire des liquidateurs, est à attirer sur ces pollutions possibles", préviennent-ils.
L'apport des sols pollués et des sédiments pollués expliquent la majorité des flux observés dans les rivières. Les chiffres obtenus au niveau des estuaires (station observatoire du Rhône à Arles – SORA, barrage de Poses pour la Seine) font apparaître des quantités annuelles de PCB dans l'eau arrivant à la mer "largement supérieures aux rejets industriels connus." Ainsi, 144 kg de PCB sont comptabilisés annuellement à Arles pour des rejets industriels dans l'eau inférieurs à 5 kg. Cette présence de PCB "est vraisemblablement liée à une contamination sédimentaire historique se traduisant, selon les conditions hydrologiques, par des relargages dans l'eau".
Meilleure maîtrise des rejets et principe de précaution
En revanche, les sources d'émission ont été réduites via notamment les mises aux normes "successives" des usines d'incinération des ordures ménagères (UIOM). Les mesures prises dans le cadre du second plan national santé environnement prévoyaient une réduction de 30% des émissions de dioxines et PCB d'ici fin 2013 pour les installations classées. Depuis 2004, une division par quatre des émissions de dioxines des UIOM et autres ICPE a été observée : elles sont passées de 287g en 2004 à 73g en 2009. Les émissions de PCB ont, quant à elles, été divisées par trois entre 1990 et 2008.
Dans le cadre du plan PCB, 300 sites ont été répertoriés au niveau national présentant des contaminations des sédiments les plus importantes, supérieures à 10 ng/g MS (nanogrammes par gramme de matière sèche). Pour chaque site, ont été prélevées et analysées deux espèces indicatrices, l'une fortement bio-accumulatrice de PCB (anguille, barbeau ou brème), l'autre faiblement bioaccumulatrice (gardon, perche, sandre ou vandoise). Soit 7.957 analyses de poissons réalisées de 2008 à 2011, par la Direction générale de l'alimentation (DGAL) et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal).
A l'heure actuelle, près de 60 départements sont concernés par des interdictions de consommation et de commercialisation de poissons de rivière, qu'elles soient "partielles ou totales", sur les six bassins hydrographiques métropolitains (Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée et Corse, Seine-Normandie).
Ces interdictions ont été prises suite à l'étude nationale d'imprégnation aux PCB des consommateurs de poissons d'eau douce, menée par l'Agence de sécurité sanitaire (Anses). Les résultats, publiés en janvier 2012, ont montré que les niveaux d'imprégnation observés chez plus de 600 pêcheurs "étaient comparables à ceux observés dans la population générale". Mais 2,5% de la population (dont 0,3 % de femmes en âge de procréer) dépassaient les seuils préconisés par l'Anses. Sur la base de cette étude, l'Agence a rendu un avis fin 2011 recommandant de limiter les consommations de poissons d'eau douce fortement bio-accumulateurs (anguille, barbeau, brème, carpe, silure).
Le mode de gestion actuel du risque, via les interdictions de commercialisation, "se justifiait, en application du principe de précaution, dans une logique de moratoire tant qu'on ignorait les résultats de l'étude d'imprégnation". Mais les rapporteurs appellent à "réviser" ces interdictions selon le nouvel avis de l'Anses attendu en mai 2014. Ces interdictions de consommation plutôt que l'application de "recommandations ciblées" ont eu des "conséquences importantes" pour les pêcheurs professionnels en eau douce, déjà "affectés par le plan anguille", dont les mesures d'accompagnement prévues se "sont révélées peu efficaces", pointent-ils.
Elimination des appareils pollués
Concernant l'élimination des transformateurs contenant plus de 500 ppm de PCB, sur les 550.000 identifiés, 150.000 ont été concernés par l'opération après analyse des teneurs. Début juin 2013, après plusieurs opérations de relance, de mobilisation des services, de recours aux sanctions administratives, il reste 133 appareils à éliminer chez 44 détenteurs, notamment "des hôpitaux devant déménager et des entreprises en situation économique difficile".
Le décret d'avril 2013 prévoit d'étendre l'élimination des appareils pollués à plus de 50 ppm d'ici 2025, soit 120.000 transformateurs.
Les actions d'élimination des PCB contenus dans les matériels électriques et autres produits "doivent se poursuivre, de même que la réduction des rejets de PCB aujourd'hui mal connus chez les ferrailleurs et autres traiteurs de véhicules hors d'usage", recommandent les auteurs.
L'avenir du plan PCB
Les modélisations liant contamination des poissons et contamination des sédiments sont à "généraliser" pour être notamment utilisées dans le cadre du suivi des PCB qui sera demandé par "l'actualisation de la directive cadre sur l'eau".
Les rapporteurs recommandent également de maintenir un groupe de travail interministériel sous pilotage du ministère chargé de l'écologie et associant les parties prenantes et d'"améliorer les données" liées à la gestion des PCB. Ils appellent à prendre en compte les dégagements atmosphériques de PCB et à s'intéresser davantage au milieu marin "dont les enjeux sanitaires sont plus importants encore que ceux du milieu fluvial".
Le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a publié le 17 avril un rapport évaluant le plan quinquennal de lutte contre les polychlorobiphényles (PCB), lancé en 2008, suite aux taux de contamination relevés dans les poissons du Rhône.
Pour rappel : cette contamination avait été révélée dans le cadre du plan de surveillance de la qualité des aliments, au cours du premier semestre 2005. Des teneurs élevées en PCB avaient été retrouvées dans des brèmes prélevées dans une dérivation du Rhône : le canal de Jonage. Depuis, plusieurs campagnes successives de prélèvements et d'analyses ont été menées sur plusieurs espèces de poissons et sur les sédiments. Utilisés pour leurs propriétés isolantes et diélectriques, notamment dans des appareils électriques (transformateurs, condensateurs…), les PCB sont des composés aromatiques "très stables, réputés cancérigènes et classés comme perturbateurs endocriniens", souligne le CGAAER dans son rapport. Si leur fabrication et leur utilisation sont interdites en France depuis 1987, ils sont encore une source de pollution "qui est sous surveillance".
Le plan PCB 2008-2013 comprenait un programme d'analyse des sédiments et des poissons du fleuve, ainsi qu'un programme de mesure de l'imprégnation en PCB de consommateurs de poissons d'eau douce. Il prévoyait aussi un plan d'élimination des transformateurs électriques pollués. Depuis le 31 décembre 2010, il est interdit de détenir des appareils dont le fluide contient plus de 500 ppm (parties par million) de PCB, selon le décret du 18 janvier 2001.
L'évaluation du plan a été menée conjointement avec le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Ses actions ont mobilisé "des fonds importants" sur le budget de l'État, soit 13 millions d'euros permettant de "mieux cerner l'étendue de la contamination", auxquels s'ajoutent 500 millions € dédiés à l'élimination des transformateurs.
Rémanence des PCB dans les sédiments
Le plan est aujourd'hui "quasiment terminé", concluent les rapporteurs. S'il a permis "de bien améliorer la connaissance des contaminations par les PCB et la manière de les gérer", ce plan n'est toutefois pas parvenu "à éliminer les contaminations constatées dans les sédiments des cours d'eau". "Malheureusement, les PCB resteront présents dans les sédiments de nombreuses années", alertent les auteurs.
Les sites industriels ayant utilisé des PCB dans le passé pour des fabrications diverses (linoleum, peinture, ..) demeurent des sources "potentielles" de contamination, de même que ceux qui abritent d'anciens transformateurs. "L'attention des repreneurs, voire des liquidateurs, est à attirer sur ces pollutions possibles", préviennent-ils.
L'apport des sols pollués et des sédiments pollués expliquent la majorité des flux observés dans les rivières. Les chiffres obtenus au niveau des estuaires (station observatoire du Rhône à Arles – SORA, barrage de Poses pour la Seine) font apparaître des quantités annuelles de PCB dans l'eau arrivant à la mer "largement supérieures aux rejets industriels connus." Ainsi, 144 kg de PCB sont comptabilisés annuellement à Arles pour des rejets industriels dans l'eau inférieurs à 5 kg. Cette présence de PCB "est vraisemblablement liée à une contamination sédimentaire historique se traduisant, selon les conditions hydrologiques, par des relargages dans l'eau".
Meilleure maîtrise des rejets et principe de précaution
En revanche, les sources d'émission ont été réduites via notamment les mises aux normes "successives" des usines d'incinération des ordures ménagères (UIOM). Les mesures prises dans le cadre du second plan national santé environnement prévoyaient une réduction de 30% des émissions de dioxines et PCB d'ici fin 2013 pour les installations classées. Depuis 2004, une division par quatre des émissions de dioxines des UIOM et autres ICPE a été observée : elles sont passées de 287g en 2004 à 73g en 2009. Les émissions de PCB ont, quant à elles, été divisées par trois entre 1990 et 2008.
Dans le cadre du plan PCB, 300 sites ont été répertoriés au niveau national présentant des contaminations des sédiments les plus importantes, supérieures à 10 ng/g MS (nanogrammes par gramme de matière sèche). Pour chaque site, ont été prélevées et analysées deux espèces indicatrices, l'une fortement bio-accumulatrice de PCB (anguille, barbeau ou brème), l'autre faiblement bioaccumulatrice (gardon, perche, sandre ou vandoise). Soit 7.957 analyses de poissons réalisées de 2008 à 2011, par la Direction générale de l'alimentation (DGAL) et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal).
A l'heure actuelle, près de 60 départements sont concernés par des interdictions de consommation et de commercialisation de poissons de rivière, qu'elles soient "partielles ou totales", sur les six bassins hydrographiques métropolitains (Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée et Corse, Seine-Normandie).
Ces interdictions ont été prises suite à l'étude nationale d'imprégnation aux PCB des consommateurs de poissons d'eau douce, menée par l'Agence de sécurité sanitaire (Anses). Les résultats, publiés en janvier 2012, ont montré que les niveaux d'imprégnation observés chez plus de 600 pêcheurs "étaient comparables à ceux observés dans la population générale". Mais 2,5% de la population (dont 0,3 % de femmes en âge de procréer) dépassaient les seuils préconisés par l'Anses. Sur la base de cette étude, l'Agence a rendu un avis fin 2011 recommandant de limiter les consommations de poissons d'eau douce fortement bio-accumulateurs (anguille, barbeau, brème, carpe, silure).
Le mode de gestion actuel du risque, via les interdictions de commercialisation, "se justifiait, en application du principe de précaution, dans une logique de moratoire tant qu'on ignorait les résultats de l'étude d'imprégnation". Mais les rapporteurs appellent à "réviser" ces interdictions selon le nouvel avis de l'Anses attendu en mai 2014. Ces interdictions de consommation plutôt que l'application de "recommandations ciblées" ont eu des "conséquences importantes" pour les pêcheurs professionnels en eau douce, déjà "affectés par le plan anguille", dont les mesures d'accompagnement prévues se "sont révélées peu efficaces", pointent-ils.
Elimination des appareils pollués
Concernant l'élimination des transformateurs contenant plus de 500 ppm de PCB, sur les 550.000 identifiés, 150.000 ont été concernés par l'opération après analyse des teneurs. Début juin 2013, après plusieurs opérations de relance, de mobilisation des services, de recours aux sanctions administratives, il reste 133 appareils à éliminer chez 44 détenteurs, notamment "des hôpitaux devant déménager et des entreprises en situation économique difficile".
Le décret d'avril 2013 prévoit d'étendre l'élimination des appareils pollués à plus de 50 ppm d'ici 2025, soit 120.000 transformateurs.
Les actions d'élimination des PCB contenus dans les matériels électriques et autres produits "doivent se poursuivre, de même que la réduction des rejets de PCB aujourd'hui mal connus chez les ferrailleurs et autres traiteurs de véhicules hors d'usage", recommandent les auteurs.
L'avenir du plan PCB
Les modélisations liant contamination des poissons et contamination des sédiments sont à "généraliser" pour être notamment utilisées dans le cadre du suivi des PCB qui sera demandé par "l'actualisation de la directive cadre sur l'eau".
Les rapporteurs recommandent également de maintenir un groupe de travail interministériel sous pilotage du ministère chargé de l'écologie et associant les parties prenantes et d'"améliorer les données" liées à la gestion des PCB. Ils appellent à prendre en compte les dégagements atmosphériques de PCB et à s'intéresser davantage au milieu marin "dont les enjeux sanitaires sont plus importants encore que ceux du milieu fluvial".
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