...
jeudi 27 novembre 2014
13:12
Les indigènes Munduruku organisent les 26 et 27 novembre une grande marche pour protester contre les nouveaux projets de mégabarrages du gouvernement brésilien en Amazonie. Partis de la ville de Santarem, les manifestants doivent longer le Tapajós, affluent de l’Amazone, pour rejoindre le site du futur barrage de São Luiz do Tapajós, qui intéresse deux entreprises françaises, EDF et GDF Suez.
Une des seules régions encore préservées de l’Amazonie, le bassin du rio Tapajós abrite une biodiversité extrêmement riche et encore peu étudiée. La construction de grands barrages ne manquerait pas d’occasionner, directement et indirectement, une déforestation massive, et d’affecter gravement l’équilibre des écosystèmes locaux, avec des conséquences irréversibles. Les indigènes y voient une atteinte à leur territoire et à leur identité (théoriquement protégés par la Constitution brésilienne), et ont annoncé qu’ils s’opposeraient par tous les moyens à la construction de ces ouvrages.
Quelques centaines de kilomètres vers l’Est, le mégabarrage de Belo Monte, défraie la chronique depuis des années. Ce grand projet – prévu initialement sous la période de dictature militaire, abandonné lors du retour à la démocratie puis relancé au nom de l’« accélération de la croissance » - a suscité l’opposition acharnée des indigènes et des environnementalistes brésiliens, qui se sont attiré la sympathie d’une bonne partie de la communauté internationale. Pas suffisamment cependant pour refroidir les ardeurs du gouvernement brésilien et des entreprises intéressées à la construction de nouveaux mégabarrages sur le rio Tapajós et ses affluents [1]. Parmi ces dernières, deux entreprises françaises, EDF et GDF Suez.
Que viennent-elles donc faire dans cette galère ? Toutes deux ont participé au « Groupe d’études Tapajós » (GET), destiné à étudier la « faisabilité » de grands barrages dans le bassin du rio Tapajós. Les activités du GET ont contribué à envenimer les relations entre les peuples indigènes locaux et l’administration fédérale, qui n’a pas hésité à faire appel à l’armée. Toutes deux sont déjà actives dans le secteur des grands barrages en Amazonie, GDF Suez depuis plus longtemps que sa rivale EDF, qui vient juste de racheter le barrage de Sinop, non loin de là . Toutes deux ont publiquement évoqué leur candidature pour la construction du barrage de São Luiz do Tapajós, le plus grand et le plus potentiellement destructeur des ouvrages hydroélectriques projetés dans le bassin.
Batailles juridiques, campagnes citoyennes
Les enchères destinées à choisir le consortium qui construira ce barrage devaient se tenir en décembre 2014, mais elles ont été soudainement annulées du fait de l’opposition d’une partie de l’administration brésilienne, qui estimait que les garanties apportées par le GET sur la protection de l’environnement et des droits des indigènes n’étaient pas suffisantes. Les enchères sont maintenant annoncées pour le début de l’année 2015. La construction du barrage de Belo Monte avait elle aussi déjà été émaillée de batailles juridiques et administratives à répétition. Une partie du pouvoir judiciaire brésilien s’oppose systématiquement aux projets de grands barrages, au motif qu’ils portent atteinte aux dispositions légales et constitutionnelles brésiliennes sur la protection des indigènes et de l’environnement.
Pour le moment, tous ces efforts ont été vains, car le gouvernement dispose d’un outil juridique datant de la dictature, la « suspenção de segurança », qui lui permet de suspendre toute décision judiciaire défavorable aux barrages au nom de la « sécurité nationale ».
En France, la campagne contre les barrages du Rio Tapajós et contre l’implication d’EDF et GDF Suez dans ces projets est animée par les ONG Amazon Watch et Planète Amazone. Le leader indigène Raoni a fait circuler un appel solennel ciblant explicitement EDF, qui a obtenu le soutien de plusieurs personnalités écologistes françaises.
Source © Olivier Petitjean / multinationale.org
[1] Les entreprises brésiliennes de BTP notamment, comme Odebrecht et Andrade Guttierez, figurent parmi les principaux financeurs de la vie politique brésilienne, y compris de la présidente Dilma Roussef et son Parti des Travailleurs. D’autre part, pour préserver sa coalition gouvernementale, Dilma Roussef a besoin des voix des élus « ruralistes », partisans du développement de l’agrobusiness, des barrages et des mines en Amazonie. De sorte que ses relations avec les peuples indigènes n’ont cessé de se tendre depuis des années (lire notre entretien avec Sonia Guajajara).
Une des seules régions encore préservées de l’Amazonie, le bassin du rio Tapajós abrite une biodiversité extrêmement riche et encore peu étudiée. La construction de grands barrages ne manquerait pas d’occasionner, directement et indirectement, une déforestation massive, et d’affecter gravement l’équilibre des écosystèmes locaux, avec des conséquences irréversibles. Les indigènes y voient une atteinte à leur territoire et à leur identité (théoriquement protégés par la Constitution brésilienne), et ont annoncé qu’ils s’opposeraient par tous les moyens à la construction de ces ouvrages.
Quelques centaines de kilomètres vers l’Est, le mégabarrage de Belo Monte, défraie la chronique depuis des années. Ce grand projet – prévu initialement sous la période de dictature militaire, abandonné lors du retour à la démocratie puis relancé au nom de l’« accélération de la croissance » - a suscité l’opposition acharnée des indigènes et des environnementalistes brésiliens, qui se sont attiré la sympathie d’une bonne partie de la communauté internationale. Pas suffisamment cependant pour refroidir les ardeurs du gouvernement brésilien et des entreprises intéressées à la construction de nouveaux mégabarrages sur le rio Tapajós et ses affluents [1]. Parmi ces dernières, deux entreprises françaises, EDF et GDF Suez.
Que viennent-elles donc faire dans cette galère ? Toutes deux ont participé au « Groupe d’études Tapajós » (GET), destiné à étudier la « faisabilité » de grands barrages dans le bassin du rio Tapajós. Les activités du GET ont contribué à envenimer les relations entre les peuples indigènes locaux et l’administration fédérale, qui n’a pas hésité à faire appel à l’armée. Toutes deux sont déjà actives dans le secteur des grands barrages en Amazonie, GDF Suez depuis plus longtemps que sa rivale EDF, qui vient juste de racheter le barrage de Sinop, non loin de là . Toutes deux ont publiquement évoqué leur candidature pour la construction du barrage de São Luiz do Tapajós, le plus grand et le plus potentiellement destructeur des ouvrages hydroélectriques projetés dans le bassin.
Batailles juridiques, campagnes citoyennes
Les enchères destinées à choisir le consortium qui construira ce barrage devaient se tenir en décembre 2014, mais elles ont été soudainement annulées du fait de l’opposition d’une partie de l’administration brésilienne, qui estimait que les garanties apportées par le GET sur la protection de l’environnement et des droits des indigènes n’étaient pas suffisantes. Les enchères sont maintenant annoncées pour le début de l’année 2015. La construction du barrage de Belo Monte avait elle aussi déjà été émaillée de batailles juridiques et administratives à répétition. Une partie du pouvoir judiciaire brésilien s’oppose systématiquement aux projets de grands barrages, au motif qu’ils portent atteinte aux dispositions légales et constitutionnelles brésiliennes sur la protection des indigènes et de l’environnement.
Pour le moment, tous ces efforts ont été vains, car le gouvernement dispose d’un outil juridique datant de la dictature, la « suspenção de segurança », qui lui permet de suspendre toute décision judiciaire défavorable aux barrages au nom de la « sécurité nationale ».
En France, la campagne contre les barrages du Rio Tapajós et contre l’implication d’EDF et GDF Suez dans ces projets est animée par les ONG Amazon Watch et Planète Amazone. Le leader indigène Raoni a fait circuler un appel solennel ciblant explicitement EDF, qui a obtenu le soutien de plusieurs personnalités écologistes françaises.
Source © Olivier Petitjean / multinationale.org
[1] Les entreprises brésiliennes de BTP notamment, comme Odebrecht et Andrade Guttierez, figurent parmi les principaux financeurs de la vie politique brésilienne, y compris de la présidente Dilma Roussef et son Parti des Travailleurs. D’autre part, pour préserver sa coalition gouvernementale, Dilma Roussef a besoin des voix des élus « ruralistes », partisans du développement de l’agrobusiness, des barrages et des mines en Amazonie. De sorte que ses relations avec les peuples indigènes n’ont cessé de se tendre depuis des années (lire notre entretien avec Sonia Guajajara).
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